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AGNES OBEL – Interview – Paris, mardi 9 novembre 2010

Une révélation… Depuis la sortie de l’envoûtant ‘Philharmonics’ en octobre dernier – et même un peu avant – la renommée d’Agnes Obel, jeune pianiste Danoise installée à Berlin, n’a cessé de monter à vitesse grand V pour atteindre aujourd’hui des cimes inattendues. Rencontre avec une grande artiste qui est en train de mettre l’Europe entière à ses pieds.

AGNES OBEL - Interview - Paris, mardi 9 novembre 2010

Puisque tu sors aujourd’hui ton premier album, pourrais-tu me parler un peu de tes origines, et notamment quand et comment tu as commence la Musique?

Agnes Obel :Je suis originaire de Copenhague. J’ai grandi avec ma famille dans une maison au Nord de la ville. Je pense que mon intérêt pour la musique vient d’eux parce que ma mère joue du piano classique. Elle en a acheté un nouveau quand j’avais environ 4 ans et elle s’est rendue compte que ça m’intéressait. J’ai aussi un frère que ça n’intéressait pas du tout ! Elle a vite vu la différence et m’a fait faire du piano et à lui de la batterie je crois ; il joue aussi de la guitare. C’est comme ça que ça a commencé pour moi parce que j’ai très vite trouvé mes propres sensations au piano et je ne me suis plus arrêtée depuis. On parle souvent de trouver ce que l’on veut faire dans la vie, mais ça n’a jamais été le cas pour moi. J’ai l’impression que ça a toujours été là, en moi, comme un ami proche. C’est quelque chose de ‘permanent’, je veux dire par-là que j’ai fait d’autres choses dans ma vie, mai ça c’est toujours resté. J’ai eu beaucoup de chance d’avoir appris à jouer d’un instrument d’une manière très décontractée. Ma famille ne m’a jamais obligée à en faire, le principal était de prendre du plaisir. J’avais un professeur de piano classique qui m’a dit que je ne devais pas jouer ce que je n’aimais pas. Donc je jouais seulement ce qui me plaisait. On ne m’a jamais forcée à jouer autre chose. Je ne suis pas allée au conservatoire et donc je n’ai pas connu cet apprentissage « dur » de la musique. Ma formation a été très différente de celle des gens qui font vraiment de la musique classique. Ma façon de jouer, le temps que j’ai voulu y passer, tout cela était mon propre choix. Plus tard, à l’école, j’ai fait de la musique avec un groupe, j’ai notamment joué de la basse. Puis j’ai fait des études de production musicale, d’ingénieur du son… Voilà pour mon parcours !

Tu t’es installée à Berlin, était-ce un choix artistique ou personnel ?

Agnes Obel : C’était un choix personnel. Je n’avais aucune idée de ce qui se faisait musicalement à Berlin, ce n’est pas pour ça que je m’y suis installée. C’était à un moment de ma vie où j’avais besoin de quelque chose de différent. J’ai passé toute ma vie à Copenhague et j’avais l’impression de ne plus être suffisamment curieuse. J’aime cette ville, c’est chez moi, mais je commençais à me sentir désintéressée. Je suis allée à Berlin pour la première fois en 2004-2005, et j’ai trouvé cette ville si ‘cool’, si différente et si ouverte… Rien n’est figé, tout est en constante évolution, donc je me suis dit que c’était la bonne ville pour moi.

AGNES OBEL - Interview, Paris, mardi 9 novembre 2010Dans le passé tu as joué avec un groupe qui s’appelait Sohio (http://www.myspace.com/thesohioproject, ndlr) avec Elton Theander, c’était très différent de ce que tu fais maintenant…

Agnes Obel : Oui, c’était un groupe de Rock.

Ce n’est pas une direction que tu voulais prendre en solo?

Agnes Obel : Non. En groupe il y a pas mal de personnes impliquées. Chacun apporte son bagage, ses influences, il y avait un fan des Beatles, un autre de Scott Walker… C’était un compromis. J’aimais jouer avec ce groupe, mais musicalement parlant nous étions tous très différents. Maintenant il n’y a plus qu’une personne, Elton. En fait son prénom c’est Elton John, parce que ses parents avaient décidé de le nommer comme le chanteur ! Il a un studio au Danemark, il enregistre pour pas mal d’autres personnes aussi. J’ai notamment travaillé avec lui sur certains projets, je l’ai aidé sur des arrangements de piano et de cordes. Ca m’a permis d’apprendre beaucoup de choses. On a aussi fait de la musique pour le théâtre et le cinéma ensemble. Bref, plein de choses, et c’était vraiment fun, mais le problème restait de trouver un terrain d’entente en terme de composition, et de ce point de vue nous étions trop éloignés.

Pour en venir à ton album, tu as été révélée en France par la chanson ‘Riverside’, pourrais-tu m’en parler un peu?

Agnes Obel : C’est une chanson que j’ai écrite quand j’étais à Berlin. C’était à un moment un peu bizarre pour moi. ‘Just So’ venait tout juste de sortir en Allemagne comme musique pour une publicité (Deutsche Telekom, ndlr), et on entendait cette chanson tous les jours car c’était une très grosse campagne. Je n’étais encore qu’au milieu de l’écriture de mon album et c’était vraiment… étouffant! D’autant plus car je ne suis pas Allemande, c’était un drôle de sentiment. Donc quand j’ai écrit cette chanson j’étais un peu à l’écart, en dehors de Berlin, là où mon copain a un studio – il fait des films d’animation – j’avais donc mon studio derrière lui, je lui ai donc demandé si je pouvais y rester à l’abri, dans un endroit calme loin de la télé et de la radio pour pouvoir travailler seule. C’était parfait. C’est donc là que j’ai fait ‘Riverside’

Et c’est ton copain qui a tourné le clip?

Agnes Obel : Oui, c’est lui. Normalement il ne fait que des films d’animation, mais il est très doué avec les images.

Oui, visuellement le clip est très beau… Et à quoi correspond ce vélo qui brûle dans la vidéo?

Agnes Obel : Aha! Il faudrait lui demander!… je ne sais pas, je dirais qu’il n’aime pas quand c’est trop ‘doux’. Dans ses films d’animation il y a toujours quelqu’un qui se fait tirer dessus ou quelque chose qui brûle, c’est sa marque de fabrique! Si ça ne dépendait que de lui il y aurait encore plus de choses en train de brûler!

AGNES OBEL - Interview, Paris, mardi 9 novembre 2010Et la force des images, pas seulement dans la vidéo mais aussi sur l’artwork, c’est quelque chose d’important pour toi pour compléter la musique?

Agnes Obel : Oui, c’est très important pour moi. J’essaie autant que possible d’avoir le contrôle, de prendre les décisions moi-même.

Alors pourquoi as-tu choisi de mettre un hibou à côté de toi sur la pochette du single ‘Just So’, et aussi à l’arrière de l’album?

Agnes Obel : Sur la pochette je voulais un autre élément en dehors de moi. Ce n’est pas comme si l’album était biographique, je craignais que juste une photo de moi soit mal interprétée et me fasse tomber dans telle ou telle catégorie. Le hibou à mes côtés semblait être le bon choix. C’est une image forte par laquelle on est attiré lorsque l’on regarde la pochette. C’est aussi parce que je suis une grande fan des films d’Alfred Hitchcock, c’est pour ça que je voulais que ce soit un oiseau, comme dans le film ‘Les Oiseaux’, et bien que ce soit un hibou et qu’il n’y en ait pas de dans le film, celui-ci semble tellement vivant et sauvage… Il y a quelque chose d’effrayant et fascinant à la fois avec les animaux sauvages que je ne peux pas vraiment expliquer, une fois encore comme dans le film, il n’y a aucune explication à cette invasion des oiseaux. Ce sont les forces de la nature, quel que soit le contrôle de l’homme, elles sont là. Ce point me semblait judicieux pour présenter l’album.

Sinon ‘Just So’ était comme nous en parlions ton premier single en Allemagne et avait servi pour une publicité. Je trouve l’atmosphère de ce morceau un peu plus enjouée que le reste, qu’en penses-tu?

Agnes Obel : Oui, mais cette chanson a été aussi été composée longtemps avant les autres, sur un équipement différent, j’en avais d’ailleurs très peu à l’époque! Je l’avais écrite et enregistrée sur un piano qui avait un son franchement pas terrible, mais qui convenait bien à cette chanson, et un micro bon marché. Le son entier de ce titre est donc différent. Donc oui c’est plus enjoué, sans que je puisse vraiment dire pourquoi. Je ne dirais pas que les paroles sont positives, mais le ressenti de la chanson l’est, en effet. Mais je pense que c’est vraiment lié à mon équipement limité d’alors, tu ne peux pas faire grand chose avec les sons sans matériel adéquat, il y a plus de limites et le résultat est donc plus ‘compact’. C’est aussi plus facile pour moi de travailler ainsi!

Et les chansons de l’album ont-elles été écrites sur une longue période, ou sont-elles pour la plupart récentes?

Agnes Obel : Certaines sont plus anciennes. ‘Wallflower’ a été écrite quand j’allais à l’université, donc il y a vraiment longtemps, et puis ‘Avenue’ et ‘Louretta’ sont également des chansons plus vieilles. Et puis enfin ‘Just So’. J’ai composé tout le reste à Berlin pour l’écriture de l’album. C’est donc un mélange d’anciennes et de nouvelles chansons.

Et est-ce difficile pour toi d’écrire en Anglais comme ce n’est pas ta langue natale?

Agnes Obel : Ca vient naturellement. Comme je te le disais j’ai joué dans des groupes dans le passé et on chantait déjà en Anglais. Il y a une connexion naturelle avec la musique Anglo-saxonne, la langue convient aux morceaux et c’est aussi comme ça que j’ai appris l’Anglais.

Tu n’as jamais envisagé de chanter en Danois?

Agnes Obel : Non!…

AGNES OBEL - Interview, Paris, mardi 9 novembre 2010En fait je ne connais qu’un groupe qui chante en Danois, Under Byen (prononcé avec mon accent terrible, ndlr!)

Agnes Obel : Oh!… Under Byen (prononcez plus ou moins ‘Onabune’, ndlr). C’est un excellent groupe! Ils ont une manière incroyable de faire fonctionner le Danois dans leurs chansons. En ce qui me concerne je n’ai jamais fait ça, donc ça ne viendrait pas aussi naturellement, ça me demanderait du travail, mais qui sait, peut-être un jour ! Mais mon éducation musicale tourne complètement autour de l’Anglais, ainsi que celle des gens avec qui j’ai joué en groupe par le passé. Et puis Elton (de Sohio, ndlr) a aussi l’Anglais comme langue maternelle car il a grandi à Londres bien qu’il soit Danois.

Pourquoi as-tu choisi de reprendre une chanson de John Cale sur l’album (‘Close Watch’, ndlr)?

Agnes Obel : J’aime la clarté avec laquelle l’amour est abordé sur cette chanson. C’est comme une chanson d’amour, où le personnage est aimé par quelqu’un mais se retrouve en même temps complètement aveuglé. J’aime cette ambiguïté, être amoureux et avoir le coeur brisé, mais aussi la simplicité avec laquelle il exprime ces sentiments. Il parle des dangers de l’amour d’une très belle manière.

Y-a-t-il d’autres instruments que tu aimerais jouer sur scène, ou es-tu heureuse avec le piano?

Agnes Obel : Non. Enfin pour le moment on a juste essayé une autre configuration où je joue des éléments de percussions. Mais comme j’ai besoin de mes deux mains au piano c’est assez compliqué. Sinon je commence à jouer de l’auto-harpe et j’espère pouvoir en faire un peu plus dans le futur, car j’ai plusieurs chansons à l’auto-harpe que j’ai jouées jusqu’à maintenant au piano, mais ça ne rend pas tout à fait pareil.

Ton album vient de sortir et c’est déjà un beau succès. Comment réagis-tu à cela?

Agnes Obel : Je me sens très bien! Et très surprise! Je suis très contente que le disque sorte en France et de pouvoir venir jouer ici et dans d’autres pays. Je ne m’attendais pas à ce que le succès soit si gros. Pouvoir sortir mes chansons était déjà quelque chose de très important pour moi. Le disque a été bien accueilli dans d’autres pays et j’en suis aussi étonnée que ravie. A l’origine l’album ne devait sortir qu’au Danemark et en Allemagne, je ne m’attendais pas à ce qu’il sorte au Royaume-Uni, en France… Et maintenant il va aussi sortir aux Etats-Unis, c’est vraiment cool!

Propos recueillis le mardi 9 novembre 2010 à Paris.

Un grand merci à Agnes Obel, à Jean-David Alimi pour avoir rendu cette interview possible, ainsi que toute l’équipe de Pias France.

Pour plus d’infos:

Lire la chronique de ‘Philharmonics’
Voir la galerie photos du concert à la Flèche d’Or, le jeudi 28 octobre 2010

http://www.agnesobel.com/
http://www.myspace.com/obelmusic
http://www.facebook.com/pages/Agnes-Obel/117116991666427

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